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Jeanbaptistekolie.jpgJe mets en garde ! Je vais strictement m’abstenir de parler de politique ici. Car malheureusement encore dans ce pays, les partis politiques sont des ‘’partis-individus’’, ethniques et régionalistes. Car jusque-là, en Guinée et dans la plupart des pays d’Afrique d’ailleurs, ce n’est que grosse désillusion pour quelqu’un qui croit vraiment en un parti-institut politique qui ne se fonde pas sur une personne mais sur une idéologie et des programmes. En Guinée, la prolifération des micros partis et leur disparition dès la mort de leurs mentors sont des illustrations éloquentes de cette réalité. La formule est simple : il suffit d’avoir de l’argent (peu importe comment on l’a acquis) pour se créer son parti et se faire idéaliser et diviniser par ses militants ethniques ; même si dans la réalité y a rien, mais vraiment rien en terme de qualités comme celles du messie tant attendu par tout un peuple. En conséquence, en manque de compétence et de réel leadership, on utilise égoïstement et impitoyablement de gros appâts que sont l’ethnie, la région et la religion pour jeter le peuple à la boucherie. Nous sommes en 2013 !


Pardon ! J’ai promis de ne pas parler de politique. Seulement vous comprenez que c’est vraiment difficile de la dissocier des causes de plusieurs des actes qui gangrènent la coexistence pacifique et le lancement du développement en Guinée. Malgré cette évidence, c’est mieux de mettre en veilleuse le sujet politique sinon cette invitation à la prise de conscience que je tiens à adresser à tous mes compatriotes sera connotée et vidée de toute sa bonne foi. Tournons donc nos regards vers ce qui s’est passé. Je ne relaterai pas les faits douloureux et opprobres des tueries entre ethnies Guerzé et Konianké à Koulé, NZérékoré et Beyla en Guinée Forestière les 15, 16 et 17 juillet 2013. Je nous invite plutôt à y réfléchir avec courage et objectivité. Regardons-nous en fasse !


En effet quand j’ai appris d’abord qu’à Koulé puis à NZérékoré et ensuite à Beyla des gens s’entretuaient, j’ai été profondément indigné et bouleversé. En me regardant dans le miroir j’ai vu plusieurs ombres des gens de mon village qu’ils soient guerzés ou koniankés se succéder dans le reflet de mon image. Quand j’ai fermé les yeux les visages de mes camarades d’enfance proches ou lointains des deux ethnies de l’école primaire et du collège n’ont cessé de défiler dans ma tête. Et apprendre que ces gens sont en train de se battre, pas seulement se battre entre eux, mais sont en train de s’entretuer, n’était que stupéfiant. Pour quelqu’un qui a grandi dans ce village et ses villes, joué au football et à tous les jeux d’enfance avec des amis des deux ethnies, aimé des gens pas pour leur ethnie mais pour d’autres raisons, il est difficile de s’imaginer ce qui s’est passé. Devant cette situation je ne peux taire et garder pour moi seul les sentiments d’impuissance, de honte et de révolte que je vis depuis.


Impuissance puisque je n’avais aucune possibilité d’être ici NON pour me battre mais pour essayer d’apaiser les nerfs. Réussirais-je, serais-je une des nombreuses victimes ? Car selon les nouvelles qui nous arrivent, certains auraient succombé sous des balles ‘’perdues ?’’ Comme ç’aurait été le cas d’un camarade très proche durant notre vie universitaire, qui était assis tranquillement devant sa maison à NZérékoré. Comme pour dire que tous les morts n’étaient pas forcément dans les rangs de combat. Quoiqu’il en résultait, mais au moins j’aurais fait ce que j’aurais pu !


Honte oui ! Parce que j’estime que c’est honteux de raconter à d’autres gens que dans mon pays les gens s’entretuent ; on croirait que les faits se déroulent à une étape bien révolue de notre humanité. Je ne trouve aucun orgueil sinon une grosse gêne d’en parler à d’autre ou de poster sur Internet des photos des victimes, brûlées et hachées comme des viandes de boucherie. Chacun a sa façon d’informer, et je respecte. Mais faudrait-il encore que la cause de la mort qu’on poste soit un peu ‘’normale’’ : un accident, une calamité… même ça. La mort c’est la mort parce qu’exprime chez n’importe qui la fin de la vie, mais la façon d’y arriver devrait être humaine. A mon humble avis, c’est bien honteux de conter de tels actes à la solde d’un peuple qui devrait prouver à la face du monde que les raisons de sa domination par d’autres peuples à travers l’esclavagisme et la colonisation n’ont jamais été justes et fondées. Un peuple dont les leaders qui ne jurent et parjurent au bout des lèvres que par le développement et le bonheur de leurs peuples devraient se préoccuper à démontrer que ce développement n’est dû ni à la providence ni à la position géographique du pays, mais rien d’autre qu’une question de volonté et que la pauvreté n’est nullement une fatalité. Des leaders qui devraient travailler pour faire tomber les masques caractéristiques de leur pays fortement stéréotypés et qui ne sont d’autres que la maladie, les guerres, la famine, les animaux sauvages. Il faut avoir à raconter d’autres choses sur nos pays. Quant à la diabolisation, y en a eu assez, basta ! Ainsi pense-je. Mais ai-je raison si on est encore à l’étape de s’entretuer au lieu de s’entraider ? Ai-je raison de croire ainsi si au moment où les puissantes nations vont au-delà de leurs frontières pour faire de grandes alliances pas seulement idéologiques mais économiques, chez nous on se retire sur des espaces plus petits à l’intérieur d’un même et petit pays pour se replier sur nos ethnies, nos régions ? Qui a choisi d’être guinéen, guerzé, Konianké, soussou, peul, malinké, toma, baga, kissi, diankanké, tomamania, kouranko… ?


Je suis révolté que de ces actes beaucoup d’innocents sont morts. Des gens qui n’ont jamais su pourquoi y a eu bagarre, pourquoi ça courrait par ci, par là. Des enfants qui n’ont jamais demandé á naitre guergés ou koniankés. Des gens qui sont sortis le petit matin de leur maison afin d’y retourner avec de quoi apporter à manger aux membres de leurs familles. Mais ces gens qui certainement étaient les uniques supports de leurs familles, n’y retourneront plus jamais, sans jamais savoir pourquoi ils sont morts ! Comment seront les vies des orphelins, veufs, veuves, parents endeuillés par la forfaiture commise ? Comment ? Voyez-vous ! Allons-nous revivre ensemble ? Vraiment ?


C’est vraiment triste et révoltant que nous ne soyons pas encore prêts pour le travail et pour notre développement. C’est lassant qu’à la moindre discorde on se sert de l’ethnie, de la région et de la religion pour retourner aux époques préhistoriques et allumer dans nos villages et villes des feux ardents de haine. Il est inconcevable qu’aujourd’hui nous fassions recours à de tels règlements. J’insiste nous sommes en 2013 pas en l'an 500 de notre ère, et même à cette époque-là déjà ! On ne peut pas vivre ensemble sans heurts, mais il faut avoir l’élégance de l’homme moderne pour répondre. Comment peut-on nous laisser nous faire manipuler tant bas ? Refusons d’être des marionnettes ! Avançons ! Y a trop de choses qui nous attendent. Travaillons pour que le ‘’quoi manger’’ aujourd’hui ne soit plus notre souci. Travaillons pour nous doter d’électricité, d’eau potable, de routes, d’industries de transformation, des réseaux de télécommunications qui tiennent et qui nous libèrent de la prison d’être obligés de porter sur soi deux ou trois voire quatre téléphones. Quand on travaillera pour réussir le pari des NTIC, on comprendra qu’avoir deux, trois ou quatre numéros de téléphone mobile, loin d’être un luxe comme on le croit en Guinée est vraiment un calvaire. On comprendra que c’est vraiment ridicule que lorsqu’un résident guinéen communique son contact téléphonique, il aligne une litanie de numéros de mobile de presque toutes les compagnies qu’il y en a, en Guinée. Oui tous ses numéros pour se préparer au ‘’au cas où’’ un réseau s’en va (on ne sait jamais où ?) qu’on puisse être joint sur l’autre réseau.


Réveillons-nous ! Il n’est écrit dans une aucune pièce d’identité le nom de l’ethnie sinon la nationalité. Celle en laquelle nous nous reconnaissons tous est la guinéenne. La seule chose qui nous reste encore et qu’il faut défendre avec toute notre énergie. Soyons simplement citoyens guinéens tout court, conscientisés qui n’attendent pas qui que ce soit pour poser des actes de civisme. Sinon si on attend on sera trop bien seuls, on finira par s’exterminer et nos ‘’grands leaders’’ n’auront plus qu’à s’approprier tout seuls et tout bonnement de ce pays que nous aimons tous ! Aujourd’hui certains peuvent se dire que c’est seulement affaire entre guerzés et koniankés, mais on se sait pas à qui le tour demain car détenir des armes de guerre à son domicile devrait faire réfléchir tout le monde. A moins que l’on soit décidé de vivre dans un champ de guerre. Et dans ce cas, les libériens et sierra léonais nous dirons á leur tour bienvenus chez nous ‘’réfugiés’’ comme fut jadis leurs tours. Dans ce cas je ne sais pas qui gagnera cette guerre ? Mais ce qu’on sait tous, c’est sans doute, la Guinée elle perdra.


Réfléchissons-en !


Paix aux âmes des victimes !


Jean-Baptiste KOLIE
jbakol@yahoo.fr

Tag(s) : #Société-Guinée